Définition: Dilatation de l'aorte avec perte du parallélisme de ses
bords. Les anévrismes abdominaux sont 2 fois plus fréquents que les anévrismes
thoraciques. L'atteinte aortique est très fréquente, par rapport aux autres
artères, du fait de la grande fréquence de l'athérome aortique qui est
l'étiologie principale. L'évolution constante en taille et vers la fissuration
nécessite une prise en charge multidisciplinaire.
Facteurs de risque: Pour l'athérome:
1. Hypertension
artérielle
2. Hypercholestérolémie, taux élevés de lipoprotéines de
basse densité, taux bas de lipoprotéines de haute densité
3. Athéromatose
précoce familiale
4. Tabagisme
5. Diabète
sucré
6. Obésité
7. Sexe
masculin
8. Sédentarité
9. Âge
Epidemiologie :
10. Génétique facteurs héréditaires peuvent être incriminés
dans certaines formes d'athérome précoces ou dans la maladie de Marfan
11. Âge de prédilection: 60-70 ans pour les anévrismes athéromateux
; Enfant: sur malformation congénitale ou syphilis congénitale
Sexe de prédilection:
4 fois plus fréquents chez l'homme
Étiologie:
1. Athérome (95%); les anévrismes sont consécutifs à des hémorragies pariétales
secondaires à la rupture de plaques d'athérome.
2. Infection: syphilis tertiaire (thoraciques ou partie haute de l'aorte abdominale),
bactéries (endocardites, salmonelloses, mycobactéries ...)
3. Anévrismes
inflammatoires (surtout thoraciques): polyarthrite rhumatoïde,
spondylarthopathies, maladie de Horton, maladie de Takayasu, polychondrite
chronique atrophiante, maladie de Behçet, anévrismes inflammatoires primitifs
idiopathiques ou associés à une fibrose rétropéritonéale
4. Anévrismes sur
anomalie congénitale: méga-dolicho-artère, maladie de Marfan, Ehlers-Danlos,
coarctation aortique
5. Anévrismes traumatiques
Signes cliniques :
1. Formes non compliquées
- Fréquente latence clinique (découverte systématique
dans un bilan d'athérome ou par une imagerie demandée pour une autre raison) -
Douleur inconstante avec accalmies, sourde, lancinante, de tous types -
Anévrismes thoraciques: double foyer de battement systolique, souffle
systolique inconstant, abaissement systolique de la trachée - Anévrismes
abdominaux: masse battante (70%) médiane ou gauche, ovoïde, bien limitée, peu
mobile, indolore, expansive, pulsatile, fréquemment soufflante
2. Complications: compressions, fissuration et rupture, embolie
Diagnostic
différentiel: • Anévrisme thoracique - Aorte déroulée, aorte en bouclier -
Tumeurs médiastinales - Dissection aortique - Anévrismes du tronc
brachio-céphalique ou de l'artère pulmonaire • Anévrisme abdominal non
compliqué - Une masse au contact de l'aorte peut être battante mais non
expansive. - Tumeur gastrique, colique, pancréatique - Aorte perceptible chez
un sujet maigre, neurotonique ou athéromateux • Rupture d'anévrisme abdominal -
Infarctus mésentérique - Pancréatite aiguë nécrotique - Infarctus du myocarde -
Dissection aortique .
Anatomie pathologique:
1. Aspect: le plus souvent fusiformes, rarement cylindro-sacciforme (syphilis) ;
Paroi fibreuse, disparition de la structure habituelle, thrombose
intrasacculaire constante; la paroi peut être épaisse, ou mince (homme,
dolicho-méga-artères) avec risque accru de fissuration.
2. Topographie: (les anévrismes peuvent atteindre plusieurs segments)
1. Segment 0: anévrismes du sinus de Valsalva, souvent congénitaux, souvent
asymptomatiques et découverts lors de la rupture (péricarde, cavités
cardiaques), parfois associés à d'autres malformations cardiaques
2. Segment 1: aorte ascendante (site privilégié des anévrismes syphilitiques et des
anévrismes des maladies inflammatoires), souvent associés à une insuffisance
aortique, rupture privilégiée dans le péricarde
3. Segment 2: segment horizontal, rupture dans la trachée ou le médiastin
4. Segment 3: aorte thoracique descendante (le plus souvent athéromateuse), compression
privilégiée de l'œsophage, du canal thoracique, des nerfs récurrents,
phréniques ou pneumogastriques; risque de paraplégie par atteinte de l'artère
d'Adamkiewicz, rupture habituelle dans l'œsophage, la plèvre gauche, une
bronche gauche - Rares formes thoraco-abdominales, pouvant s'étendre au tronc
cœliaque
5. Segment 4: anévrismes sus-rénaux (rares et de traitement chirurgical difficile)
6. Segment 5: anévrismes sous-rénaux (signe de De Backey: on peut glisser la main entre
le bord supérieur de l'anévrisme et le rebord costal)
Les examens
complementaires :
1. Radiographie de
thorax: tumeur médiastinale faisant corps avec l'aorte quelle
que soit l'incidence, parfois cerclée de calcifications; signes de compression
sur la trachée, l'œsophage, un corps vertébral ou une côte; le caractère
vasculaire peut être apprécié en scopie
2. Abdomen sans
préparation de face et de profil - Opacité alvéolaire
mal limitée, calcifications dessinant le contour artériel - Retentissement sur
les organes voisins (3èmeduodénum, corps vertébraux, rein gauche)
3. Échographie cardiaque
transpariétale: augmentation du diamètre, écartement systolique
4. échographie
abdominale: examen clé à l'étage abdominal, délimite l'anévrisme et
son épaisseur
5. Tomodensitométrie aortique souvent
nécessaire
6. Aortographie, idéalement par voie humérale ou axillaire, ne visualise que le chenal,
souvent étroit, le sac anévrismal étant obstrué par un caillot; apprécie la
situation précise par rapport aux différents axes et avec le lit d'aval.
7. UIV: rechercher un retentissement sur les voies urinaires évaluable par
l'urographie intraveineuse, et sur le duodénum par le transit baryté
gastroduodénal
Traitement :Mesures générales: Contre-indication des endoscopies
thoraciques en cas d'anévrisme thoracique ; traiter la constipation .
Hospitalisation pour la chirurgie
1. Bilan du terrain (car très fréquent athérome diffus
pouvant compliquer la prise en charge, notamment pour une chirurgie lourde);
certaines localisations athéromateuses devront être prise en compte, et parfois
avant l'anévrisme aortique.
2. Traitement essentiellement chirurgical, généralement mise
à plat - greffe prothétique : L'indication opératoire est formelle quand
l'anévrisme est symptomatique ou > 6 cm ; La chirurgie peut être récusée quand
l'anévrisme est petit chez un sujet âgé et/ou en cas d'association à une tare
somatique majeure.
Complications:
I - Compression (selon le siège de
l'anévrisme)
1. Veine cave supérieure: syndrome cave supérieur
2. Trachée, bronche souche gauche: toux, dyspnée d'effort ou
de posture, atélectasie du poumon gauche ; Bronche souche droite ou artère
pulmonaire droite en cas d'anévrismes de l'aorte ascendante
3. Compression du canal thoracique: œdème des membres
inférieurs et du membre supérieur gauche ( syndrome de Ménétrier )
4. Nerf
récurrent gauche: voix bitonale
5. Sympathique thoracique: syndrome de Claude-Bernard-Horner
6. 3ème ou 4ème duodénum: nausées, vomissements, anorexie,
dyspepsie
7. Haut appareil urinaire: colique néphrétique,
hydronéphrose
8. Veine cave inférieure: œdème ou thrombose veineuse des
membres inférieurs
9. Racines
lombaires: lombalgies, sciatalgies
II - Thrombose in situ : symptomatologie variable selon le type anatomique et le
type de collatérales obstruées: claudication d'un membre supérieur, accident
vasculaire cérébral, paraplégie en cas d'atteinte de l'artère d'Adamkiewicz,
infarctus mésentérique ou claudication digestive, ischémie aiguë d'un membre
inférieur ...
- Apparition plus progressive: syndrome de Leriche,
ischémie intestinale
- Embolie distale (même remarque)
III - Rupture: mortelle dans 80% des cas :
1. Crise fissuraire, rare, annonce la rupture: douleur,
variation tensionnelle, signes de choc
2. Dans le péricarde: hémopéricarde avec tamponnade mortelle
3. Dans
les bronches: hémoptysie
4. Dans la plèvre (surtout à gauche): hémothorax
5. Dans
le médiastin
6. À la peau (très rare) sus-sternale ou intercostale
7. Dans le péritoine: hémopéritoine suraigu, le plus souvent
immédiatement fatal
8. Dans le rétropéritoine: hématome rétropéritonéal, plus
fréquent: douleurs intenses, choc, ecchymose du flanc ou de l'aine parfois
visible; l'évolution est parfois plus lente.
9. Dans une veine (veine cave inférieure, veine rénale
gauche): fistule artério-veineuse - Dans le tube digestif (3ème duodénum):
hématémèse - Dans l'uretère: exceptionnellement
IV - Surinfection
(surtout par les salmonelles), accélérant
l'évolution de l'anévrisme: symptomatologie d'endocardite
Évolution et pronostic:
1. Évolution spontanée inéluctable vers l'augmentation de
volume en diamètre et en longueur
2. Survie dans un cas sur deux en cas de chirurgie effectuée
après rupture
3. Complications de la chirurgie : Lâchage de suture ;
Ischémie per ou post-opératoire (membres inférieurs, paraplégie, côlon)
4. Décompensation du terrain polyartériel (accident
vasculaire cérébral, infarctus du myocarde ...)
5. Risque de récidive anastomotique sur les berges de la
prothèse